Que nous apprend la grève dans l’usine de Toyota ?
Tout conflit social est un Muda. Il donc pas très peu courant d’entendre parler de grève chez Toyota. Selon les medias, la raison de la grève chez Toyota est la demande par les salariés du paiement à 100% de leurs journées de chômage partiel. Apparemment la proposition de la direction de l’entreprise de payer le chômage partiel à hauteur de 75 % du brut a été refusée par les grévistes. Si mes comptes sont bons(et je n’en suis pas certain), 75% du brut signifie une perte de salaire de 3% par rapport a une situation normale. En effet, en temps normal le net correspond en moyenne à 78% du brut. Certes, toute perte de salaire pour des ouvriers (qui gagnent environ 1300 euros) est toujours douloureuse. Selon la Voix du Nord, cette proposition de paiement de 75% du brut « a bloqué sur le paiement des jours de grève » –encore une spécificité française.
Comme dans tout conflit, les responsabilités sont partagées. Je ne me prononcerais pas sur la proportion de responsabilité des uns et des autres. Ce n’est pas mon propos ici. La seule apparition de ce conflit en elle-même est un échec. Pour être juste avec la France et les concurrents de Toyota, il faudrait signaler que le faible niveau des conflits sociaux chez Toyota peut s’expliquer par leur style de management mais également par la culture (pour celles qui sont au Japon) ou par les zones d’installations de leurs usines (pour celle qui sont aux USA). En effet, aux USA les usines de Toyota sont installées dans la partie Sud du pays, loin du bastion du très puissant syndicat UAW (United Auto Workers) qu’est Detroit. De fait, ces usines ne sont pas syndiquées. Quelquefois cela peur rendre les négociations plus faciles…
Ce conflit me permet de m’interroger sur le niveau d’imprégnation de la culture Toyota dans les usines comme celles d’Onnaing. Ces dernières années, Toyota a abandonne son mantra stratégique « notre but est de satisfaire les besoins du client » au détriment de « bigger is better » qui est si courant dans le monde de business occidental. Ainsi, le constructeur nippon a beaucoup donné dans la croissance ces dernières années. Afin de croitre très rapidement Toyota, a fait de gros compromis sur le développement et la formation de ses employés au TPS. L’introduction à la culture TPS, qui avant prenait de nombreuses années, a dû être accélérée. On a beau être Toyota, quand on accélère, on court de grands risques de bruler des étapes et obtenir de mauvais résultats. Les signes avant-coureurs, tels que les rappels de millions de voitures, étaient déjà apparus avant la crise. Ce type de grève et les pertes abyssales avenir de Toyota (3.8 milliards de dollars prévus) illustrent assez bien les récentes erreurs du groupe. Par exemple, il est souvent reproché Katsuaki Watanabe (le précédent PGD de Toyota) son erreur stratégique dans la décision d’ouvrir une usine à San Antonio, Texas USA pour construire des « full-size pick-up trucks ». Décision surtout guidée bar la volonté de croissance, selon certains observateurs. Cette erreur a accéléré son départ de la tête de Toyota .Soyons clairs, la croissance en elle-même ne peut pas être une stratégie. Quand elle a lieu (comme conséquence du succès), il faut la surveiller comme le lait sur le feu. Une petite parenthèse et un clin d’œil pour signaler le fait que la stratégie de J-M. Folz a son arrivée en 1998 à la tête de PSA tenait en 3 points : Croissance, Rentabilité et Innovation… Il y aurait beaucoup à dire sur cela mais c’est un autre sujet…
Je reviens sur Toyota pour conclure ce post. Je pense que la faculté d’apprentissage et de kaizen est très forte chez Toyota et je suis certain que cela sera très déterminant dans la suite. Je n’ai aucun doute que, malgré ces quelques erreurs, le constructeur nippon restera pour très longtemps encore un acteur de premier plan…